dimanche 16 janvier 2011

Se voiler la face


De l'origine de l'expression...

Il y avait jadis une jeune et jolie princesse, Isabelle. Elle tomba amoureuse de Pierre, le premier palefrenier de son père. Il faut dire que c'était un fort bel homme : grand, le teint mat, les yeux légèrement dorés, il avait un port de tête noble et se déplaçait de manière élégante. De plus, cet homme avait un caractère doux, social, enjoué, serviable et se montrait cultivé. Il parlait d'une voix grave et chantonnait volontiers en pansant les chevaux. Le cœur de la jeune princesse battait la chamade et ses joues s'empourpraient quand elle le croisait ou l'entendait.

Pierre, de son côté, n'était évidemment pas indifférent aux charmes d'Isabelle…

La jeune princesse était désespérée car son père la destinait au prince Nicolas, un prince héritier aussi hautain que sot, aussi laid que riche et qui avait plus du double de son âge. Le prince Nicolas louchait, bégayait, sentait le tabac et ses joues étaient couperosées comme celles de certains vieux ivrognes. Mais comme elle était une princesse de devoir, Isabelle s'apprêtait à sacrifier sa vie sentimentale aux alliances politiques voulues par son père.

"Fais attention ma sœur", lui dit son aînée, un jour qu'elle l'avait vue converser longuement avec Nicolas. "Ta voix et surtout ton visage te trahissent. On remarque que cet homme te déplaît. Tu fais la moue à chacune de ses paroles…"

"Faites attention, ma douce enfant", lui dit sa grand-mère, la reine douairière. "Je vous ai vue plisser le nez en signe de dégoût alors que Nicolas vous complimentait. Si votre promis venait à s'en apercevoir, cela ferait mauvais effet."

Alors, Isabelle, prit la résolution de ne plus rencontrer son fiancé que le visage voilé d'un tissu très fin, orné d'une dentelle délicate, d'une teinte assortie à la couleur de sa robe. Derrière ce voile, il lui arrivait de rire des sottises que disait Nicolas, de sourciller, de grimacer tout à son aise… Elle prit conscience que le voile offrait aussi un autre avantage : il rendait moins visible le visage disgracieux de son promis et le lui rendait ainsi un peu plus supportable.

Ses parents demandèrent à Isabelle quelles étaient les raisons du port de cet étrange ornement : "Mes chers parents, répondit-elle, j'en entendu notre premier ministre dire qu'il fallait assurer la survie de nos industries textiles qui périclitent ces derniers temps. En lançant cette mode, j'espère les sauver…"

Le prince Nicolas qui je vous l'ai dit était un imbécile, jugea que sa promise était sûrement atteinte d'une maladie dermatologique. Il ne crut pas un mot des royales explications et refusa d'encore épouser Isabelle sous le prétexte qu'il ne voulait pas pour reine d'une personne qui se voilait la face devant ses sujets et suivait des coutumes étrangères.

Mais vous comme moi, nous savons qu'Isabelle ne portait ce voile que pour dissimuler ses réactions et voir de manière plus floue cet homme qui ne lui plaisait pas du tout… L'expression est restée jusqu'à nos jours : on dit qu'on se voile la face quand on s'arrange pour ne pas voir ce qui ne nous convient pas.

Ah j'oubliais, comme la jeune princesse ne devait plus épouser le prince Nicolas, elle put épouser Pierre… Pierre et Isabelle se marièrent, furent très heureux et eurent deux enfants beaux comme le jour, intelligents et bons comme l'étaient leurs parents.

Exercice fait à l'atelier d'écriture du 10 janvier.

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